(...) Avec Arcimboldo, nous jouons à ce jeu qu'on appelle le « portrait chinois » : quelqu'un sort de la pièce, l'assemblée décide d'un personnage qu'il faudra deviner, et lorsque l'enquêteur revient, il doit résoudre l'énigme par le jeu patient des métaphores et des métonymies : Si c'était une joue, que serait-ce ? - Une pêche. - Si c'était une collerette ? - Des épis de blé mûr. - Si c'était un œil ? - Une cerise. - J'ai trouvé : c'est l'Été.Dans la figure de l'Automne, l'oeil (terrible) est fait d'une petite prune. Autrement dit (en français, du moins), la « prunelle » (botanique) devient la « prunelle » (oculaire).On dirait que, tel un poète baroque, Arcimboldo exploite les « curiosités » de la langue, joue de la synonymie et de l'homonymie. Sa peinture a un fond langagier, son imagination est proprement poétique : elle ne crée pas les signes, elle les combine, les permute, les dévoie - ce que fait exactement l'ouvrier de la langue. (Roland Barthes, Essais critiques III, pp.122-3)